Michel est parti. Il avait 71 ans. Il est l’un des jeunes frères de mon père. Il vivait près de Manosque depuis une quarantaine d’années. Professeur, amateur de jazz, poète, peintre, céramiste. Le fils rebelle qui a refusé la guerre d’Algérie, le fils prodigue devenu artiste. C’est assez curieux d’évoquer la mémoire d’un homme qu’on n’a pas connu. Un homme de la famille qui était le grand absent, celui dont on ne parlait pas mais auxquels mes grands-parents vouaient une admiration sans limite. Au grenier, sa chambre de jeune homme, lumineuse, qu’il avait peinte avec des motifs et des fresques qui rappelaient les pochettes des disques de jazz des années 40-50, est restée intacte, inviolée jusqu’à la disparition de ma grand-mère. Un peu partout, ses céramiques. Quelques peintures ornaient les murs d’une maison sans décoration. Ses recueils de poésie étaient précieusement conservés. Malgré les apparences, il y avait une forme de pudeur, de silence. Un clair matin Au saut du l